• Un jour d'avril 1944....

                    Mon jour de gloire ?

                C'était, si je me souviens bien, le Lundi de Pâques 1944. La guerre était là, bien présente, depuis déjà 5 ans. Nous avions passé la soirée chez des voisins et amis à Juvisy, ville de banlieue parisienne où nous habitions depuis de longues années déjà. Nos amis avaient un immense jardin et ce "plan d'eau" ou étang, appelé le Miroir...Ce Miroir était peuplé de petits poissons, dont des tanches que mon frère, avant la guerre, avait le droit de pécher et...qui sentaient fort la vase ! Mais, le plaisir de pêcher et d'avoir du poisson frais (!) faisait oublier ce goût un peu spécial. Le Miroir était alimenté par la rivière l'Orge, affluent de la Seine, qui traversait alors tout Juvisy. Au bord du Miroir, nos amis avaient installé une sorte de petite passerelle enjambant "l'arrivée d'eau" de l'Orge...ça décorait le jardin et ça faisait un peu décor d'opérette...Du sol au-dessus de cette passerelle, il y avait bien...30 ou 40 centimètres !

                 Voilà, j'ai planté le décor !

                 Le soir, après dîner, tout à coup toutes les sirènes de JUVISY et des environs se mettent "en branle"...Lugubre...Et on commence à entendre au loin (mais pas tellement) le bruit de bombes, la DCA allemande et les avions de bombardement. Quelqu'un dans la rue crie, c'est sur VILLENEUVE-ST-GEORGES !c'est-à-dire, de l'autre côté de la Seine, mais à quelques petits kilomètres seulement. J'ai toujours été un peu "froussarde" et, pour ne pas déroger, je tremblais de tous mes membres ! N'écoutant que mon courage du moment, je suis arrivée à me mettre à l'abri (si on peut dire), sous ce petit pont de décoration. Comment j'y suis entrée dans cet abri? Je n'en sais rien... poussée par ma grande peur vraisemblablement ? Mais le plus grave...c'est que, après l'alerte, je ne pouvais plus me sortir de là. Je n'avais plus de forces, je les avais utilisées pour entrer et me cacher. Ma mère et nos amis se sont moqués de moi, si peu sportive, mais qui avais battu un record de souplesse...j'étais au moins pliée en quatre pour avoir pu me glisser là-dessous.

                Ce sont des moments et des choses qu'on n'oublie pas ! d'autant plus que 8 jours après très exactement, le bombardement avait lieu sur JUVISY et notamment notre quartier...Nous avons dû alors faire de l'escalade après le bombardement pour nous sortir de là (décombres et bombes à retardement). Je n'ai toujours pas compris comment j'avais fait ! Vraiment, si comme disait mon mari "la peur n'évite pas le danger", elle peut vous donner des ailes !

                70 ans déjà !....J'étais toute jeune alors...Maintenant, en cas d'alerte aérienne, ma souplesse me ferait bien défaut...Et même les "souviens-toi" ne m'apporteraient rien et ne me feraient pas avancer dans la voie des exploits !

     

     

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  • Commentaires

    1
    Mercredi 9 Avril 2014 à 17:33

    Et elle était en quoi cette passerelle ?

    Parce que, si en bois, elle ne vous aurait guère protégée, même d'un éclat. (Note pour les jeunots : un abri ça sert à protéger des éclats, pas des coups directs des bombes.)

    Tiens une histoire : lors du 2ème gros bombardement de Nantes (23 Septembre 1943), ma mère et un sien cousin étaient réfugiés sous un pont (en pierres) et, là, était aussi une dame avec un oreiller sur la tête recourbé pour lui protéger les oreilles.
    Cela fit bien glousser ma mère et son cousin, ils avaient tort : ce n'était pas contre le bruit que cette dame se protégeait, c'était contre les éclats.

     

    2
    Mercredi 9 Avril 2014 à 17:41

    Cette passerelle était en bois, toute petite (elle n'avait rien du Pont Neuf !). C'était juste "pour faire joli".
    Moi, je me souviens des soldats qui nous avaient transportés pendant l'exode. Quand des avions nous mitraillaient, ils descendaient de leur camion et venaient à l'arrière se mettre la tête à l'abri. Juste la tête, tout le reste était à l'extérieur et ainsi, ils n'avaient pas peur...Il n'y a que la foi qui sauve...

    3
    Mercredi 9 Avril 2014 à 18:01

    Pendant ledit exode, beaucoup de gens avaient le bon réflexe : se jeter dans le fossé au bord de la route. Et tant pis s'il était plein de boue.

    Et pourtant là ce n'était que mitraillage, pas bombardement.
    Il n'empêche, sauf coup au but (voir Jeux interdits), ça les protégeait.

    Mon grand-père avait construit, au bout de son jardin, une simple tranchée recouverte de tôle et de terre. Et, en cas d'alerte, lui, sa femme, mon père et mon oncle y trouvaient un abri (relativement) sûr.
    Il faut préciser qu'ils habitaient à quelques centaines de mètres d'une usine d'armement.

     

    4
    Mercredi 9 Avril 2014 à 18:20

    Je suis bien d' accord, la peur donne des ailes, et alors, on ne se pose pas la question de savoir si on peut !

    Sale affaire que les guerres, et je ne mettrais pas ma main au feu pour affirmer qu' il n' y en aura plus.

    C' est bien d' avoir des souvenirs, ça montre au moins qu' on s' en est sorti !

     bonne soirée

    bisous

    5
    Mercredi 9 Avril 2014 à 21:14

    @ Leoned et Trublion -

    "que mitraillage" et pas bombardement dites-vous ! j'ai été sous les deuxs et je puis vous affirmer que lorsque vous êtes dessous, il n'y en pas un meilleur que l'autre ! Le mitraillage tuait surtout des innocents...lâcheté de la part de ceux qui l'exerçaient et dont le but était seulement d'atteindre le moral  des personnes. Les bombardements alliés avaient pour but final d'exterminer les voies de communication, les ponts, les points stratégiques...et il y eut des dégâts "collatéraux" malheureusement. Une guerre n'est jamais bien propre !

    Oui Trublion, la peur donne des ailes !!! Pendant la dernière guerre, j'ai eu peur à différentes reprises et...j'ai battu des records de vitesse et de souplesse !

    6
    Jeudi 10 Avril 2014 à 04:03

    Comme vous le dites si bien la peur n'évite pas le danger mais elle donne des idées et des ailes. C'est une histoire d'hormone : l'adrénaline  ou épinéphrine  qui dope l'organisme.

    Jolis souvenirs même au milieu de la peur. Chacune de vos histoires de guerre me fait penser à une film que j'avais beaucoup aimé "Effroyables jardins".

    7
    Jeudi 10 Avril 2014 à 07:25

    Bonjour Françoise. Vous parlez d'un film que j'adore ! et que j'ai en DVD...Mes histoires de guerre sont encore tellement présentes à mon esprit...ça marque une jeunesse !

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